J'ai fait des recherches sur des scènes de violence étatique ayant été largement diffusées et discutées au cours des cinq dernières années. J'ai re-regardé certaines de ces vidéos, cette fois -ci tout en annotant le mouvement. J'ai ralenti les images, noté les personnages impliqués et ai tenté de dessiner leurs mouvements. Peut-être la nécessité de détourner le regard de certaines de ces images bouleversantes m'a conduit à lancer des recherches sur l'annotation de la danse et sur l'écriture du mouvement. J'ai parlé à des danseurs de l'écriture de partitions de danse qui annoterait ces scènes. Les scènes choisies sont la violence d'Etat imposée aux corps des citoyens dans les espaces publics. Ce serait une autre forme sous laquelle l'oppression est enregistrée. Ce projet de recherche vise à être traduire en performance publique lors d'une étape ultérieure.
Le mouvement est créé et dramatisé par la violence de l'État, le rythme serait le nôtre.
Scène de l'étranglement d'Éric Garner à Staten Island, New York
Un homme vêtu d'un tee - shirt blanc se dresse au milieu de deux hommes portant des chemises noires. Ils forment un triangle dans l'espace. L'homme en blanc se déplace ses bras sur la poitrine puis vers le bas, vers ses genoux, trois fois. Il plie les genoux tout en faisant cela. Il lève son t-shirt en montrant son ventre. Les deux hommes sont immobiles. L'homme à droite a les deux bras pliés vers le haut de ses épaules. L'homme sur la gauche a les bras croisés et ses jambes écartées.
Les deux hommes en noir regardent derrière eux pour évaluer la distance puis de nouveau vers l'homme au milieu. L'homme sur la droite commence à mâcher du chewing-gum tout en bougeant la tête de haut en bas.
L'homme en blanc répète son mouvement précédent de manière répétitive et plus rapide.
L'homme sur la gauche se déplace rapidement derrière lui et essaie d'atteindre son cou.
L'homme sur la droite se déplace vers l'homme au milieu et atteint son bras. L'homme au milieu est traîné à l'arrière, tandis que deux autres hommes apparaissent de la foule et maintenant, quatre hommes le saisissent et le mettent à genoux.
L'homme au milieu tombe au sol. L'un des quatre hommes prend un peu de recul et regarde la scène.
L'homme au milieu est couché à plat ventre. L'homme qui a reculé revient et lui attrape les pieds. Deux autres hommes attrapent chacun un bras de l'homme qui est au sol. Le quatrième homme se trouve sur l'homme par terre, le bras est toujours enroulé autour de son cou.
Un cinquième homme apparaît et approche la tête de l'homme à terre.
Les cinq hommes forment un cercle serré autour de l'homme sur le sol. Ils se déplacent en coordination sans révéler l'intérieur du cercle.
Deux des hommes brisent le cercle et viennent vers le public, en bougeant les mains du haut vers le bas.
Les trois hommes qui étaient restés autour de l'homme au sol se lèvent lentement, révélant son corps inerte.
À propos de l'artiste
Tania El Khoury est un artiste qui travaille entre Londres et Beyrouth. Elle crée des spectacles interactifs et difficiles dans lesquelles le public est un collaborateur actif. Tania a fait des tournées internationales avec ses œuvres individuelles, pour lesquelles elle est la récipiendaire du Prix Total pour l'Innovation Théâtrale et du Prix Arches Brick. Elle est co-fondateur de Dictaphone Group, un collectif de recherche et de performance visant à reconquérir l'espace public au Liban.